
N° 4 - 1997
QUALITÉ DES EAUX DES SOURCES
Qualité naturelle - Influence de la surface – Pollutions
P de BRETIZEL
|
Vous pouvez aussi consulter cet article au format pdf
Le chargement peut être assez long
si vous ne disposez pas d'une connexion haut débit.
Il se fera sur une autre fenêtre
pour vous permettre de continuer à naviguer pendant le chargement
Télécharger le fichier pdf
|
I - QUALITÉ NATURELLE DES EAUX SOUTERRAINES
Les sources sont les points où affleure l'eau souterraine contenue dans les formations géologiques aquifères. Analyser leur qualité naturelle revient à analyser la qualité de l'eau souterraine hors de l'influence des eaux de surface (ruissellements, infiltrations).
1.Caractéristiques chimiques
Elles sont l'héritage de l'érosion et du lessivage des roches traversées. Elles varient donc en fonction de la nature de celles-ci.
Les substances contenues dans l'eau le sont sous forme de solutions salines ou gazeuses d'une part et sous forme de suspensions solides ou liquides d'autre part.
Les quantités relatives (teneurs) de ces solutions et suspensions varient en fonction de quatre facteurs :
- la solubilité des minéraux qui composent les roches aquifères,
- la vitesse d'écoulement de l'eau souterraine entraînant à des degrés divers l'érosion mécanique des roches aquifères,
- la température de l'eau souterraine qui dépend à la fois de la profondeur de la roche aquifère (degré géothermique) et de sa proximité éventuelle d'une zone d'activité magmatique (volcanique),
- la pression hydrostatique régnant dans l'espace d'une nappe phréatique captive (dans le cas d'une nappe phréatique libre, cette pression s'équilibre avec la pression atmosphérique).
Il est évident que les effets du facteur solubilité minérale peuvent varier d'une manière considérable selon l'importance des autres facteurs.
Plus la température et la pression augmentent, plus la solubilité minérale augmente.
Plus la vitesse d'écoulement augmente, plus la fragmentation des minéraux s'accentue et favorise la solubilité minérale.
1.1. Principales solutions salines
Carbonates
C. de calcium : C03Ca le minéral d'origine est la calcite qui est le constituant principal des calcaires.
C. de magnésium : C03 Ca Mg le minéral d'origine est la dolomite, constituant principal des dolomies.
Sulfates
S. de calcium So4 Ca 2H20 le minéral d'origine est le gypse hydraté
S. de calciumanhydre S04 Ca le minéral d'origine est l'anhydrite
Chlorures
C. de sodium Na Cl le minéral d'origine est le sel gemme (halite).
C. de potassium K Cl le minéral d'origine est la sylvinite.
Phosphates
Ph. de chaux P205 3Ca O roches carbonatées, phosphatés sédimentaires (minéral non exprimé). Apatite : minéral important des roches magmatiques et métamorphiques.
Hydroxydes métalliques
Ils proviennent de la mise en solution par l'eau souterraine de minéraux métallifères à l'état soit dispersé dans la roche aquifère, soit à l'état concentré de minerai (amas, filons, imprégnations). Le plus abondant des métaux concernés est le fer. Viennent ensuite les métaux de base (cuivre, plomb, zinc, mercure, arsenic) généralement en teneurs très faibles (traces).
1.2. Principales suspensions
Colloïdes
Dans l'ordre d'abondance :
- alumine d'origine argileuse,
- silice,
- composés organo-minéraux.
Emulsions
Hydrocarbures naturels provenant du lessivage de roches sédimentaires pétrolifères.
Solides
- débris minéraux à l'échelle du micron,
- débris organiques provenant de l'érosion de roches sédimentaires charbonneuses.
1.3. Principaux gaz dissous
Gaz carbonique: C02
Sa qualité relative est importante lorsque l'aquifère est constitué de roches carbonatées calcaires et dolomitiques. Il résulte de la dissolution de ces roches par des eaux d'infiltration d'origine pluviale, acidifiées par leur passage au travers de sols chargés en acides organiques (tanin, etc.).
Oxygène: 02
Sa présence est due au brassage de l'eau souterraine avec l'air atmosphérique à l'intérieur des espaces intergranulaires de la roche aquifère poreuse, ou à l'intérieur des vides existant dans les fractures et failles d'extension ainsi que dans les poches karstiques de dissolution dans les roches carbonatées. Sa teneur croît en fonction de la vitesse d'écoulement.
Anhydride sulfureux: SH2
Sa présence dans l'eau est due à l'oxydation de minéraux sulfurés (pyrite) qui peuvent être très abondants dans les roches sédimentaires aussi bien que dans les roches cristallines.
Méthane : CH4
Même origine que les hydrocarbures liquides.
2. Caractéristiques biologiques
En profondeur, loin de la surface, les eaux souterraines captives sont pratiquement azoïques.
Les organismes unicellulaires provenant des eaux d'infiltration sont éliminés progressivement par l'absence du rayonnement solaire et par la pression croissante.
L'apparition, puis l'augmentation de l'activité biologique annonce la proximité de la surface.
Cette apparition sera plus profonde dans le cas de circulations rapides en régime karstique d'eaux souterraines libres. Elle sera plus superficielle dans le cas de circulations lentes dans des milieux à faible perméabilité.
II - INFLUENCE DE LA SURFACE
1. Altération chimique
A proximité des points d'émergence (sources), l'eau souterraine voit ses propriétés physiques se modifier
- chute de la pression hydrostatique (cas de nappes captives),
- changement de la température par contact avec l'atmosphère extérieure,
- apparition de l'ozone atmosphérique et de la lumière solaire.
Ces modifications physiques du milieu aqueux peuvent entraîner une précipitation des solutions contenues autant à l'amont du point d'émergence qu'autour de celui-ci, à l'air libre.
I1 y a alors formation de dépôts solides dont l'accumulation peut avec le temps finir par colmater complètement les conduits aquifères au point de sortie, en même temps que l'on constate une chute des teneurs en sels minéraux
Les carbonates de calcium (calcite, aragonite) sont les plus fréquents, voire les plus spectaculaires, de ces dépôts de source (tufs) : il y a calcification totale des mousses et autres végétaux hygrophiles proliférant autour du point d'émergence grâce à l'humidité engendrée par celui-ci.
Les parties hautes des failles drainantes qui peuvent modifier la vitesse et la direction des courants souterrains sont souvent le siège de phénomènes similaires dûs aux changements de température et de pression. Les dépôts et colmatages en produits divers (carbonates, oxydes métalliques, etc.) apparaissent le plus souvent entre la surface et le niveau piézométrique, à l'interface air-eau : la faille ou fracture se transforme alors en filon. Si des vides sont laissés entre les parois , on a alors des cavités tapissées de cristaux, c'est-à-dire des géodes.
Dans les grottes creusées dans les formations calcaires (érosion karstique), les cristallisations de calcite sont souvent spectaculaires : stalactites, planchers
stalagmitiques, draperies, fontaines pétrifiantes, etc.
2. Pénétration biologique
Aux lieux d'émergence de l'eau souterraine, que ce soit des sources ponctuelles ou des zones diffuses, on observe toujours un écosystème flore et faune particulier qui tranche sur l'environnement.
Cet écosystème, très variable en fonction des différents climats, est typique des milieux hygrophiles de demi-ombre. A titre d'exemples, nous renvoyons le lecteur aux numéros 1, 2 et 3 de cette "Chronique", où on trouvera des études botaniques et entomologiques sur des sources en climat méditerranéen, en climat d'altitude (tourbières), en forêt feuillue tempérée, ainsi que dans ce numéro même. Le peuplement végétal et animal tend à s'introduire dans le domaine souterrain par les conduits aquifères et les vides où règne un air chargé d'humidité (100 %) et dépourvu d'ozone.
Les plantes chlorophylliennes (mousses, algues, prêles, etc.) se développent tant que règne encore la lumière solaire. Elles se raréfient peu à peu en profondeur et disparaissent totalement à la limite de l'obscurité absolue.
Les vertébrés (poissons, batraciens), les insectes et les protozoaires (bactéries et virus) peuvent remonter très en amont dans les conduits aquifères ou aériens. Sous terre, les espèces supérieures ont tendance à se modifier sur plusieurs générations en s'adaptant au milieu sans lumière : perte des pigments, cécité, nanisme, donnant alors des sous-espèces dites cavernicoles.
Des coléoptères cavernicoles ont été rencontrés à plusieurs kilomètres sous terre dans des grottes, comme par exemple un trichaphaenops observé dans le gouffre Berger (Vercors) à 600 mètres de profondeur et à 3 kilomètres de l'entrée.
III - POLLUTIONS
Définition sémantique générale : dégradation d'un milieu naturel.
Appliqué aux eaux souterraines et aux sources, ce terme désigne toute perturbation des équilibres chimiques et biologiques originels des eaux souterraines en provenance de la surface par ruissellement et infiltration.
Certaines pollutions sont inoffensives, alors que d'autres peuvent être très dangereuses si l'on consomme l'eau qui en est le siège.
La plupart des pollutions dangereuses résultent de l'activité humaine.
Nous donnons ci-après les valeurs maximales des différents paramètres applicables à la notion de potabilité de l'eau de consommation courante (décret ministériel 89-3), à l'exclusion des eaux thermales curatives.
1. Paramètres organoleptiques concernant l'aspect et le goût de l'eau
- Coloration
- Turbidité(solides en suspension)
- Odeur (anhydride sulfureux, phénols, hydrocarbures)
- Saveur
2. Paramètres chimiques naturels
- Chlorures < 250 mg/1 Cl
- Sulfates < 250 mg/1 S04
- Calcium < 100 mg/1 Ca
- Magnésium < 50 mg/1 Mg
|
- Sodium < 150 mg/1 Na
- Potassium < 12 mg/1 K
- Aluminium < 0,2 mg/1 Al
|
La quantité de résidus secs, après évaporation à 180 ° C, doit être inférieure ou égale à 1.500 mg/l.
3. Paramètres concernant des substances indésirables
- Nitrates < 50 m g/1 N03
- Nitrites 01 m 1 N02
- Azote libre < 2 mg/1 N
- Fer < 200 gg/1 Fe
- Cuivre < 1 mg/1 Cu
|
-Manganèse < 50 gg/1 Mn
- Zinc < 5 mg/1 Zn
- Phosphore < 5 mg/1 P2 05
- Fluor < 1,5 mg/1 F
- Argent < 10 gg/1 Ag
|
4. Paramètres concernant des substances toxiques
- Arsenic < 50 gg/1 As
- Cadmium < 5 gg/1 Cd
- Cyanures < 50 gg/1 CN
- Chrome < 50 gg/1 Cr
- Mercure < 1 gg/1 Hg
|
- Nickel < 50 gg/1 Ni
- Antimoine <10 gg/1 Sb
- Sélénium < 10 gg/1 Se
-Hydrocarbures polycycliques aromatiques <0,2 gg/1(H.P.A.)
-Pesticides < 0,5 gg/1
|
5. Paramètres biologiques
Nombre d'organismes dans 100 ml d'eau = 0 coliformes et streptocoques fécaux.
Nombre total de bactéries aérobies dans 100 ml d'eau à 20° : < 100 (pendant 24 heures)
Documents consultés
- Chronique des Sources et Fontaines
- N° 1 – 94 page 15
- N° 2 – 94 page 37 et 53
- N° 3 – 94 page 37
- Guide méthodologique d'établissement des périmètres de protection des captages d'eau souterraine destinée à la consommation humaine – LALLEMAND-BARRES A., ROUX J.C.
- Manuels et méthodes n° 19, éd. BRGM, 1989.
|
|